° PETITE SOEUR DE TRIBU

Je t’en veux -petite soeur de tribu-
de gambader toujours ailleurs,
toujours si loin, toujours sans moi

Je t’en veux d’avoir pris la fuite sans t’en expliquer ;
j’aurais tant voulu me perdre dans les villes avec toi,
squatter des instants de bonheur au hasard des rues

Je m’en veux que mes disgrâces m’aient interdit
de traverser les boulevards en ta compagnie

Je t’en veux de ne pas m’avoir donné l’occasion d’être beau,
de ne pas avoir sauté avec moi dans une piscine de ballons fauves

Je t’en veux de préférer la légèreté à la profondeur
et donc
je m’en veux de ne pas croire tout à fait
à la pureté supposée de ton nouveau dessein

Je m’en veux d’avoir encore envie de te sourire
malgré la lame plantée dans mon dos ;
mon coeur a bon dos, ça prête à sourire

Je t’en veux d’avoir levé l’ancre et sabordé la rêverie
J’apercevais déjà les dunes en bord de mer
et nos sourires pris dans la brise..
Je voulais me blottir comme un parfum de pudeur
à la caresse de ton sommeil…

Je m’en veux de t’avoir fait croire
que ta voix sensuelle ne me manquait plus.
Je me souviens si bien comment je venais boire
chaque nuit ton vin de liesse
pour m’enivrer jusqu’à l’aube de tes échappées belles..
Ton timbre, c’était le sexe d’une comète
qui caressait mon âme dans l’astre de ma chair

J’aimerais la voir passer encore une fois dans ma nuit
pour rallumer quelques flambeaux du soir
Car souviens-toi, ma hutte c’était un peu la tienne..

Je t’en veux de m’avoir glissé dans les poches
des baisers perdus ainsi que quelques envies
Demain, dans les fumées du soir
j’aurais posé ma voix dans ton oreille,
te racontant des frasques folles
– imaginaires et débraillées –
t’écoutant glisser dans les troubles moiteurs
où je t’aurais rejointe..

Je m’en veux de cette fascination que j’ai
pour tes grands yeux noirs,
d’avoir rêvé de les tenir en joug
dans l’arc félin d’une parade
claquant tout mon désir sur ta fleur de lotus

– Salutation émue à ces poils pubiens
que je ne verrai point –

Je t’en veux de m’avoir allumé sans me consumer,
de m’avoir crucifié de silence au milieu de la fête
C’est pourquoi -petite soeur- j’ai ramassé quelques pétales de souvenirs
pour faire une couronne au sommet de ta hutte..