TRILOGIE DU BRASIER: trois poèmes érotiques en prose, impudiques et débridés.

I. J’AIMERAIS : MINOTAURUS INEST – poème pour Mélia (Octobre 2020)
II. J’AI AIME : VENDANGES D’ETE – poème pour Kapucine (Septembre 2020)
III. J’AURAIS AIME : PANTHERES – Poème pour Julia (Septembre 2011) -Bonus-

Préambule

Je ne sais jamais vraiment
lorsqu’un corps est disposé
à être enlacé
même lorsqu’il se dénude
face à moi.

Je ne sais pas trouver les mots
qui enjoignent une âme
à s’attarder durablement
dans mes quartiers.

Je ne sais pas non plus me taire
car le silence me renvoie
à mon cubiste faciès
qui aurait tant besoin
de s’apaiser
sur le ventre d’une femme.

Il existe pour chacun
un être
qui a vraiment besoin de nous;
mais nous nous donnons
le plus souvent
à ceux pour qui
nous ne sommes point
nécessaires..

Je sais bien que l’herbe est plus verte
partout ailleurs que sur mes terres;
je sais bien que personne
ne me sortira jamais
du labyrinthe dans lequel j’erre
depuis toujours..

Mais ce soir
paisiblement
je viens m’asseoir:
je laisse mon âme s’embraser
au souvenir
de ta personne..

Je t’offre une allégorie:
celle de ce brasier intérieur
que je porte en moi
depuis des décennies
tel un talisman..

MINOTAURUS INEST
-Veneris monumenta-

J’aimerais que tu te postes à nouveau
au sommet de mon lit
le dos apposé contre le mur de mon salon,
quasi-nue.

Un quart de siècle nous sépare en âge,
mais tes yeux francs, intemporels, presque mystiques
m’adressent un familier langage..

Laisse-moi déposer ma joue très doucement
dans le creux de ton cou,
être la plume qui rejoint son nid..

Je suis un enfant, une panthère, une brise d’Eté;
je suis un grand soleil près d’un refuge aux portes de coton..

Ta bouche est une fleur sauvage,
qui parfume mon âme de papillon.
Vois mon aile silencieuse se poser
sur la soie de ton épaule chaude !

Le temps suspendu
infuse mon âme à ta presqu’île;
Mon souffle sur ta peau me grise:
tu es ma vapeur d’absinthe !

Ta chevelure est désormais
un vaste champs moissonné
à mon vexillum externum.

Ton épiderme irradie contre le mien
comme un pain chaud sorti des braises !

Aucun des chats sacrés de l’antique Egypte,
n’a transporté autant de lumière que ta peau :
Hathor, Isis et Rê se sourient et se taisent
lorsque je te caresse.

Tes deux pyramides sont des flacons de rivages.
Fais-moi boire de ton lait; enfante ma déraison !

Mes griffes de faucon ratissent ta nuque;
je porte mes dents à ton cou,
je mordille ta chair tel un vampire avide..

Je suis ton Minotaure, ton Lucifer, ton Dracula !

Mes doigts délicats viennent broder d’audaces
un incertain langage à même tes seins..

Des alcools de prune et de poire coulent à présent de tes tétons;
je t’attrape au cou, tel un canidé, pour te tirer lentement vers moi;
je sens tes fioles d’effluves infiltrer mon cœur;
Ta bouche capture la mienne comme une proie fébrile.
Tes bactéries s’engouffrent dans mon sang, restaurent ma matrice..
Je vois des gouttelettes d’eau fines
bouillir sur ta peau
puis s’évaporer au diapason de tes soupirs..

Tes aréoles crantées pénètrent souplement mon torse.
C’est alors que le grand mât du Drakkar se lève
et tu l’absorbes sans tarder tout entier en toi,
dans ta forêt d’éponges.

Ta rosée coule déjà du septième ciel convoité.
La chambre se tapisse d’un rouge-violacé..

Je sens ton odeur animale qui s’abat comme une tempête:
tu plantes tes yeux intenses
tel des ancres dans l’océan de mon âme.
Je me retourne tout entier sur toi,
ragaillardi par ton puissant courant.

Ta bouche carmin
a faim
de recevoir l’écume de ma lèvre.

Je t’ensevelis d’une vague puissante
et j’engouffre encore davantage
ma corne de Minotaure
dans le tréfond de ton corps.

Voici l’offrande de nacre:
de multiples orages tonnent dans ta chair
Tu tressailles d’accueillir dans ton caveau
ma liqueur de perle.

L’onde de choc de ma queue
se prolonge tel un écho parmi tes dunes.

Tu m’enfonces tes ongles dans le dos si profondément
que je sens distinctement ton nom se graver sur mes os.
Je plante à mon tour mes dents dans ta jugulaire
tandis que tes canines percent mon épaule.

Je m’abreuve, tu me bois,
nous nous embrassons follement
pour partager ce vin de messe.

Je ramasse au sol des caillots de raisin
et je les porte à ta petite gueule affamée.
Tu les dévores en me dévisageant.

Ta bouche coule infiniment
jusque dans ton nombril
et abreuve les petits papillons
qui palpitent dans ton ventre.

Le coutelas divin de ton sourire en coin
me suggère un sacrifice à venir

Tu t’éclipses dans la salle d’eau
et déjà tu m’inspires
de vilaines rêveries..

Relevant une pièce d’étoffe
trop ajustée à tes hanches
tu me laisses entrevoir
l’arrogante colline hirsute.

M’empoignant le vit en me fixant des yeux,
tu veux me voir céder à proférer
mes ordres rabaissants.

Ta bouche lascive de succube
réclame la lie de mon calice !

Ta main est un nid à serpents;
elle me caresse et me compresse
pour que je crache enfin
tous mes mots volcaniques.

Tu m’engloutis de ta gueule de fauve
pour m’assassiner de plaisir.

Des torrents hypnotiques se répandent en moi,
tandis que tu bois toute ma fontaine.

Démon repu, tu m’adresses un sourire.
Je suis une comète
dans la galaxie de tes yeux fauves.

Aucunement je n’ai la beauté d’Artemis,
mais je peux être un grand forgeron de volupté !
Fais de moi le gardien secret de tes moiteurs,
l’arboriste de ton plus secret jardin..

Je l’avoue, je suis parfois jaloux des visiteurs
que tu salues de ton candide balcon.
Tous ces mirages, si laborieux, sont autant de déserts..

Et si chaque homme est fait de sable,
je serai ton désert de Mojave,
ton Dasht-e-lout, ta Kébili.
Je serai le Queensland bouillant
au milieu des montagnes de feu.

Mon orgueil est un empire suintant,
et tu le sais toi qui réapparais
dans une robe andrinople..

De ton dos je m’approche;
tes ourlets, déjà, se pourfendent de flammèches..

Je veux sédimenter encore à ton épaule;
j’entrevois tes doux seins dans l’écorchure de ta robe;
ta bretelle s’affaisse ainsi que ta chute de reins;
soudain, le bas de ta robe s’enflamme

Tes doigts fraîchement vernis
soulèvent avec une insolente lenteur
le tissu embrasé !

Le bas de ton dos est désormais tatoué
d’obscurs hiéroglyphes;
«Sois indécent» chuchotes-tu.

J’ai besoin de lécher ta petite béance,
comme un chien des enfers !

Tes canines d’orque scintillent dans le miroir;
Tu lèves un bras au ciel;
tes doigts gracieux s’éventaillent et s’enroulent
tandis que la chambre prend feu.

Je pointe à mon tour vers le ciel un index
qui se change en verge féconde;
et tandis que les parois de ton éminence charnue
s’abandonnent à mon autorité,
j’enfonce un doigt séminal à ton nombril..

Des Jigokubana naissent soudain dans tes cheveux;
une nuée de papillons pourpres et ocres
comme sortie des enfers,
vient butiner chacune de tes mèches,
éteignant les feux alentours
de battements d’ailes..

Des abeilles rouge-ponceau surgissent à leur tour.
Tu étires ta langue en récupère de tes doigts un étrange miel
que tu portes aussitôt à mes lèvres, à mes seins;
de mon gland jusqu’au galbé séant.

Tu n’aimes rien tant que me sentir palpiter dans ta bouche;
tu me dégustes infiniment, tandis que des plumes d’ange
tombent très lentement sur nous comme une fine pluie;
tandis que des sirènes au lointain
nous chantent leurs plus doux sortilèges..

Sois mon alcool, mon brasier, ma folie,
sois ma déesse et ma putain,
Sois le petit matin des longues nuits.

Le soleil s’attarde sur mon torse
lorsque tu le caresses.
Je veux te voir tournoyer en riant
dans des champs de coquelicots mutants.

Sidère-moi;
écorche-moi de souvenirs violents !

Fais de moi le buvard de ta cyprine et de ta lave,
de ton urine et de ta bave.
Baise-moi comme si j’allais crever demain.
Je veux mourir et ressusciter dans tes bras..

Je veux tes hanches et tes pieds dans ma bouche,
ton cul sur ma gueule et ma queue dans ta main.
L’un dans l’autre, je veux nous mélanger
encore et toujours !

Je veux tes mamelons sauvages, ta peau soyeuse,
tes épaules et ton cou..
Je veux surtout tes yeux cosmiques au fond des miens
tes cuisses et ton pubis amarrés à ma taille,
quand je viendrai cent fois sur toi pour te donner mon âme !

Je rêvasse, je me languis, je me dilue..
Entends-moi s’il te plait, rejoins-moi !
Viens contre mon épaule et contemplons
les derniers instants de ce monde-ci !

Je veux me noyer sans fin dans des étreintes folles;
je veux brûler d’ivresses, célébrer le feu qui me porte
et qui m’emportera jusqu’à l’ultime crémation !
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VENDANGE D’ETE

«Je te sens encore en moi et c’est merveilleux.»

Nos conversations les plus profondes
m’as-tu dit
se font à-même-la-peau..

Dans la chair du débat, nous avons pourtant
tardé à entrer !

Peu prolixe sur tes fantasmes,
je t’effeuillais mes vicieux grimoires..

J’envisageais un grand festin de luxure,
mais ce bouquet final, vibrant entre mes anses
est à présent
une allée d’asphodèles
dans mes artères échaudés.

~

Les séquences me hantent ;
elles passent, défilent et repassent dans mon sang bouilli ;
échouent dans de blancs mouchoirs..

~

Tes lèvres se scellent aux miennes
par de grisants verrous,
sitôt dégondés, sitôt rappelés
à la forge charnue..

Tes seins, citrouilles pétries
jusqu’à l’ivresse,
par mes mains gourmandes et frénétiques:
le carrosse est lancé, le feu aux écoutilles !

Ta voix déroule de petites musiques,
de charmantes extases..
Tu chuchotes des mots comme des sortilèges..

Je mords chichement ton épaule,
infiniment tenté d’y boire
un sang doux et intense !

Je remonte la clairière tempérée de ton cou pour y broder mes ardeurs..

Ton oreille, si délicate à ma langue,
entend bien que j’écrase à ton corps mes amphores d’épices..

Tu aimes être giflée,
et je prends mon plaisir
à contenter le tien !

Je t’attrape la gueule,
je compresse tes lèvres
avides de crachats ;
je saisis ta gorge, je la sers.
Tes yeux se dilatent ;
ton sexe s’ouvre..

Je viens t’ensevelir comme une vague lourde,
me répandre
tel un prédateur piégeant sa proie
pour lui dévorer soudain la bouche !

Je m’écrase à ton dos, je capture ta gueule, je la tourne vers moi.

Ô que tu aimes ça !
Index, majeur: coutelas
caressant ta langue d’avaleuse de sabre !
Tu suces mes doigts comme des sorbets..

Tes dents sont des ornières
quelque peu acérées pour un fourreau d’épée..
Je n’aime rien tant que ta main
incertaine
cherchant à faire blanchir
ma lame ;

de cette lave tu te forges à moi !

~

Ta gorge est un flacon sans fond,
que j’aime compresser
de l’extérieur;
de l’intérieur..

Tu as la moitié de mon âge, pourtant
ce tubercule carnivore
au déploiement de tes cuisses
absorbe intensément
chacun de mes torrents
dans sa forêt d’éponges.

Ta bouche est une autre caverne étrange
où je viens me répandre
en cascades blanches
indigo..

Dès que je veux dormir,
tu viens me réveiller;
tu me prends dans ta toile de dentelles
pour te piquer à mon dard..

A mon tour, je te réveille..

Mes bras deviennent enfin des bras lorsqu’ils enlacent ton corps !
Lorsque tes cuisses capturent mes hanches,
le dragon millénaire crache son feu dans ton faste volcan !

De longs week-ends électrisés à ton réseau
ont restauré mon hypophyse
avant de délaisser
mon câble dénudé
à même l’orage..

~

Bien malgré moi, j’aspire encore
à déverser de pleins barils d’alcool de nacre
pour enivrer chaque vallée..

Caresser ce cou,
bestiale romance;
lui faire absorber
toute ma semence..

Ta peau a parfois l’odeur des bêtes grasses;
ta nuisette est un tue-la-mort !

Pourtant
j’étais loin d’être rassasié de toi,
possédé d’une viscérale foi,
jusqu’à crucifier ton ventre à ton stérilet..
«Avoue que tu es fier de toi» me lanças-tu.

Tu n’aimais pas que je m’excuse;
tu aspirais aux collisions qui laissent traces..

~

C’est alors que reparut le voyageur..
Ce quinquaméricain, boucher/militaire que tu croisas à Prague,
et sur lequel tu harponnas, bienheureuse, je ne sais quel mirage..

Il s’était éclipsé, six mois durant avec tout son mystère,
Ô mystère, ce paravent de vacuité, si cher aux pleureuses !

Moi, je te fais l’économie des petites phrases vaporeuses
déversées aux gamelles des candides rêveuses..

Je ne suis pas de ce bois qui méduse et chavire le radeau !

Tu as éveillé un dragon affamé, alors forcément je m’enflamme !

~

Tout comme ce voyageur, je t’ai connue à surgir pour mieux disparaître:
un pied ici, un autre au dehors..

Souviens-toi, la première fois que tu me proposas la botte,
tu venais d’absorber ton conjoint !

Cet élégant Massaï blanc
mis deux ans à dérider ton pistil..
Il me fallut deux jours pour que ma lance effile
ta cible de velours..
A ton caveau, quelques gorgées
de Romanée Conti !

J’aurais peut-être dû m’élancer plus tôt dans tes eaux,
toi qui venait parfois amarrer ta barque à mon épaule
pour y passer des nuits sans remous..

Nous aurions aimé dépraver nos fluides, vautrés dans la boue.
Tu m’aurais braqué la face contre ton huître, fauve !
pour m’en faire ruisseler chacune des saveurs ;
à mon tour, je t’aurais nettoyé de tes copeaux..

Poire William, chocolat chaud,
dans tes collines et tes ravins.
Rhum et pommes broyés
déversés sans tact
à tes lèvres indécentes..

Aucun gaillard à la ronde
ne dégondera ta chair
avec plus grande ferveur que la mienne,
tu le sais !

J’ai dégusté tes hanches,
tes doigts et péronés,
pimenté tout ton ranch
chevilles, cul et poignets..

C’est pourquoi
en-corps et encore,
chaque amante repointe
inlassablement
ses seins à ma bouche
sa croupe à ma souche
jusqu’à ce que je chasse
âprement la bête..

Un mois durant,
je suis resté ivre
du sang
de nos sexes gorgés..
Je voulais encore pétrir
et détourer ton Lys,
ta Sapotille,
ton Physalis..

Mais Septembre à présent,
délave le soleil
délave mes ardeurs..

Le bon vin a tourné,
la vendange d’Eté
n’a plus son amertume..
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PANTHERES

Je veux me répandre sur toi comme une poutrelle de feu,
propager mon onde sur ton corps alangui..

Panthère de rêverie, je viens frotter mon ventre sur ton écrin de mirage.
Les copeaux de mon âme pénètrent tes reliefs ;
je suis ton piège à loup décapsulant tes alcools d’ivresse ,
Je suis l’étoffe lourde qui vient boire à ton étang de nudité.
Je t’attrape au cou comme un jeune tigre joueur ,
tes mains empoignent mon torse mûr.

Ma peau est à point, tannée par la ferveur de tant d’années de passions.
Je veux planter mes orages dans tes perles d’abysse aux mystères pédants,
troubler le reflet dérangeant de tes grands yeux félins..

Tigresse, tu peux lâcher ton râle, je défenestre ta pudeur.
Les parfums de l’amour fermentent dans un ballet de gestes, de cantiques éperdus.
Tous mes wagons sauvages viennent claquer sur ta rame ;
mes canaux électriques se tendent comme des arcs
et tu me plantes ton haleine jusque dans les tripes..

Tu me décoches tes discours en regards impétueux :
– Achève-moi, que j’absorbe enfin ta matrice ;
crache ton encre-crème à mon sexe carbone !

Tes pupilles débordent de fuel ; j’attrape un ange-mateur par les paluches
et je le broie dans ta chevelure qui s’agite soudain comme un nid à serpents ;
je casse le diable en deux et je poivre ton corps !
Montre-moi tes dents de hyène échaudée et j’inverse tes pôles,
je te brode à l’épaule un murmure-baiser..

Ma langue mutine câline tes commissures de cuisses,
puis je remonte à tes crocs qui capturent mes lèvres.
Mon aréole soudain -impaire et passe- devient l’ostie de messe basse :
je te chuchote à l’oreille tes propres aveux dans l’ascension de la jouissance..

Culmine ma belle, culmine !
Je te rejoins soudain dans l’albédo violemment déployé..

Oooh, j’adore l’écho de ton timbre vibrant
lorsqu’il va pour découdre tout un pendant  de ciel !

Je m’assoupis -relax- bordé par ton aisselle fumante..

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